Si c’est un animal

Si c’est un animal est une entrée en matière dans le projet architectural à travers un point de vue expérimental, cherchant – en adoptant le biais de l’animal – à s’extraire d’une vision anthropocentrée. D’ailleurs ne dit-on pas que l’on voit mieux les choses depuis la périphérie que depuis le centre ? Ce sujet de recherche se situe dans le contexte de l’élevage, où l’homme et l’animal forment un binôme dissymétrique puisque c’est toujours l’homme qui impose ses conditions, et dont les conséquences dépassent en outre les limites même d’un territoire et d’une pratique/profession. La complexité de leur relation immémoriale se révèle plus que jamais à l’heure où nos sociétés cherchent à replacer l’homme dans la nature et intrinsèquement de redéfinir ses responsabilités vis-à-vis de celle-ci.

A partir du moment où nous reconnaissons le caractère inéluctable des interactions entre humains et animaux, nous nous heurtons à de nombreuses questions touchant à la nature de ces relations et les devoirs qu’elles engendrent.

Il s’agit de développer une réflexion théorique et projectuelle dans laquelle l’Animal devient prétexte à études, tout en y étant l’objet et le sujet. S’inscrivant dans les marges de l’éternel débat sur le rapport qu’entretiennent les hommes aux autres espèces non-humaines, ce projet interroge les limites de l’architecture en retournant les interrogations et en en développant de nouvelles. La question de l’animal sera prétexte au croisement de réflexions globales sous-jacentes et liminaires, auxquelles la discipline de l’architecture se trouve confrontée lorsque les points de vue habituels sont mis en défaut. Comment reconsidérer nos relations aux animaux à travers la conception d’espaces parcourus d’intérêts, de sens et d’affects ?

Le projet s’étale sur plusieurs échelles ; allant du territoire à l’architecture voire au design d’objets. La réflexion à grande échelle sur le territoire cherche à hiérarchiser les territoires selon les espèces d’une part, les territoires propres à l’homme d’autre parts, et les zones mixtes où l’homme et l’animal évoluent ensemble et partage les mêmes lieux. Ceux-ci ont donc besoin d’être adapté à l’un et à l’autre.

Par le biais de ce travail singulier s’exprimant au travers de trois projets (un projet par espèce), il s’agit plus synthétiquement d’étudier la relation de chaque espèce avec son milieu dans le cadre de l’élevage dans un contexte imaginé par l’homme. Ces bâtiments revêtent une dimension mixte, intéressante dans le cadre de cette recherche, puisqu’ils sont à la fois conçus pour le travail de l’homme, mais aussi pour l’animal et deviennent alors des intermédiaires entre l’homme et l’animal qui cohabitent, mais surtout, travaillent ensemble.

Ce projet se situe entre la science, la technique et la réinterprétation architecturale. Nous savons désormais que chaque espèce à ses propres caractéristiques et besoins, lesquels définissent leur relation au monde (qu’il soit artificiel ou naturel) ainsi qu’aux objets ou êtres humains qui les entourent.

Dans le cadre de ce projet, l’idée n’est pas de recréer un espace naturel par l’imitation (ce qui se fait plus ou moins bien dans les zoos), d’ailleurs nous ne ferions pas mieux que ce qui se fait sans nous, mais d’agir avec sens sur les lieux de vie qu’on leur impose et dont nous sommes le créateur. Les lieux d’élevage sont effectivement créés de toute part par l’homme, à travers l’unique point de vue humain et cherchent avant tout à être fonctionnels. Nous pouvons conserver le cahier des charges initial tout en le mettant en relation avec une façon de concevoir novatrice qui plus est, revêt un caractère pédagogique en donnant à voir ce qui est difficile à imaginer à un éventuel public (fermes pédagogiques, zoos, visites organisées dans les exploitations, …) et pourrait même servir de support de recherches scientifiques.